Sourire malin dans les yeux
Censure, censure tu m'as eu

Ses blessures ne sont jamais visibles peau nue face au soleil; elles sont invisibles et intangibles, grisantes palpitations qui flétrissent en ecchymoses autour de son cœur.

Le doute s'immisce dans le silence du confessionnal : puisque les orages sont gris, les nuages s'épaississent et la lumière postiche providentielle est vouée à devenir terne — Que pouvons-nous seulement faire, bergers de nos troupeaux sans la lumière de votre étoile cardinale ? L'acclimatation au climat-chagrin des contrées anglo-saxonnes semble aller étrangement de paire avec les rumeurs d'être une terre abandonnée par le regard divin : les immondices rampent à même la terre sainte; pire encore, ils osent se prétendre dévots sur une piètre iconographie hérétique et aucune lumière ne saurait les pourfendre de sa lueur divine.

Il les voit, factices et monstrueux, visages aux prétentions humaines et facétieux du divin : il les accueille chaque matin dans sa maison sainte et ne saurait hélas les distinguer de ses fidèles paroissiens. Mais lorsque la nuit se lève il n'y a certainement aucun doute sur la nature de ses hasardeux visiteurs : chaque visage est gravé dans sa mémoire, chaque sourire offert est une simple répétition de la même risible mascarade. Le dégout se faufile entre les lisières de sa joie postiche.

A pas de loup, il s'avance vers l'étranger qui s'était introduit dans ses quartiers : "Votre visage m'est étranger. Seriez-vous un paroissien ou un simple visiteur nocturne ?" Main apposée contre son palpitant battant, le rythme méticuleux et soigneusement contrôlé.

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Censure, censure tu m'as eu

Que ça aurait été lui ou un autre n'aurait rien changé de l'issue : ses deux yeux printemps le fixent, vides et dépourvus de toute foi à lui offrir, ses mains se retrouvent jointes contre sa propre poitrine.

C'est mesuré comme un acte presque théâtral. la main de notre bienfaiteur n'est jamais forcée, si elle arrive, un jour, c'est qu'elle tombera à point nommé.

Majestatif, impérial sans doute, son regard se niche de l'arcade de son nez à son sourire mesquin : s'il ne l'a pas regardé dans les yeux, c'est parce qu'il absout son existence.

j'écoute — nous écoutons mais pour quelles raisons souhaites-tu nous les confier ? S'il n'y a point de pénitence il n'y a aucune raison pour moi de t'alléger de ton fardeau. ses talons claquent et le bruit contre les dalles brillantes de l'église ricochent en écho au travers des strates du plafond. Deux pas et il le recouvre de son ombre. L'odeur des bougies est capiteuse. Crois-tu seulement au pardon ?

Un main se pose contre le banc, il le surplombe désinvolte.

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Censure, censure tu m'as eu

Son indolence n'est point innée. Elle n'est que la consécration d'un fardeau qui le tourmente depuis des années : l'homme a le droit au pardon lorsqu'il est cueilli entre ses mains jointes et aimantes; mais qu'en est-il du sien et de sa rédemption ? Qui pourrait écouter les égarements d'un dévot déjà trop occupé de la souffrance des siens ? Le cœur est noirci de mépris mais son sourire mécanique ne le trahit pas, il reste sur sa retenue assagie.

Hâtive peut-être, mais murement réfléchie. sa voix est étrangement douce presque enjôleuse et le Pasteur ressent dans une crainte fugace ce qui s'apparente à de la chaleur ; dans un égarement ses yeux percutent les siens et le contact de leurs doigts le fait reculer dans une appréhension qui ne lui ressemblait pas — c'est un soubresaut presque défensif qui le désaxe de sa trajectoire alors qu'il était celui qui avait initié la proximité.

Cette crainte qui germe à fleur de peau lui semble bien apatride. Et par quel miraculeux don pensez-vous que j'ai l'envie et le temps de vous écouter mon fils ?

Il est pensif mais surement inquiet ; la nature de l'homme et son le trouble : c'est deux trous noirs distordus qui n'aspirent à conquérir le néant entre eux.

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Il regagne son calme après quelques goulées d'air. Les yeux s'accrochent aux astres gravitant autour d'eux sans jamais à nouveau céder à la gravité des siens. Pensez-vous que l'homme est cohérent dans sa propre nature ? Ou qu'en tant qu'homme de Dieu je ne puisse commettre le moindre pêché d'en peur d'en perdre des plumes ? La confrontation l'intrigue mais il ne se sent point offensé; l'affliction qui le touche dans ses mots est risible face à la brûlure de son toucher fugace.

C'est à la récitation presque mécanique des psaumes qu'il retrouve une confiance pleinement bâti; sous l'égide de son bienfaiteur qu'il se redore invincible. Mes ailes ne sont ni blanches ni immaculées; Si nous prétendons n’être coupables d’aucun péché, nous sommes dans l’illusion, et la vérité n’habite pas en nous. Sa main s'appose à nouveau contre son coeur, autrefois battant à s'en rompre les côtes, il en maitrise désormais le rythme en pendulier régulier. Je suis, depuis ma naissance marqué du péché ; depuis qu’en ma mère, j’ai été conçu, le péché est attaché à moi. Il ajoute, « je suis marqué par ma nature, vendu au péché »

Winifred admire la confiance qui habite l'intrus, son assurance est presque irradiante et accapare tout ses sens; s'il s'efforce de ne pas croiser son regard, il est inexorablement hypnotisé : c'est par une violence inouïe qu'il s'efforce de n'écouter que la monotonie de ses saintes paroles qu'il connaissait par cœur. L'homme est coupable de sa propre naissance car c'est ce qui naît de l’Esprit est animé par l’Esprit. J'écoute chacun de mes fils car ils sont prêt à être pardonnés sous sa providence.

Il ne recule pas, mais il s'oppose : il ne plie pas face à son effronterie. Mais fils, je ne souhaite point te heurter, je t'aime comme j'aime chacun de mes fils. L'une de ses mains vient cueillir la sienne, autrefois brûlante. Elle est douce, délicate pourtant alourdie d'un fardeau inexplicable.

Mais si inexorablement tu cherches réellement à trouver ton pardon, ne devrais-tu pas commencer par renier ces affreux apparats ? Je ne peux sauver celui qui prétend avoir besoin de l'être. Si je ne vois ni détresse ni pénitence je ne peux t'écouter. Vois-tu l'homme souffre par nature mais je ne peux m'arrêter à la porte de chaque être vivant.

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Inexorablement il s'est toujours senti supérieur aux autres : gracié de malice et de sagesse; mais surtout de l'illumination, il n'a jamais douté de sa condition. Comme gravé à même le sang qui pulsait dans ses veines, il n'y avait jamais de doute lorsqu'il s'agissait de se mesurer à un autre : inévitablement Wini s'en s'en sortirait vainqueur. S'il connaissait si bien la pureté de l'homme c'est qu'assurément il avait déjà puisé toute la noirceur de leur coeur. Je ne sais pas si j'ai envie. La porte n'est point fermée bien qu'elle ne soit qu'à peine entre ouverte. Ses yeux inquisiteurs inspecte chacun de ses mouvements :

Si le pasteur s'écœure de sa curiosité et de sa nature immonde qui se déverse par chacun de ses pores, fatalement il finit par s'érafler contre son éloquence et la douceur de sa voix; le regard chaste mais les pensées fautives : il désarçonne les viles images d'un hoquet soutenu mais maladroit. C'est déstabilisant d'être soudainement victime d'un émoi. Comment peux-tu être si sûr que la tienne me suffira amplement ? La main est offerte, mais il le toise sans affection : ce n'était qu'un jeu cruel de son seigneur; lui mettre un monstre si humain sur son chemin pour le faire douter de ses croyances. Mais là était la vérité à concevoir : qu'importe les éloges et les émois, l'affection qui le gagne n'était que factice et forgée sous le prisme d'une illusion orchestrées par ces démons : que pouvait il y avoir de sincère dans quelqu'un dont la vie était éternelle ? S'il ne craint de repentir comment peut-être bien se comporter ? La fragilité humaine de corps comme d'esprit se devait d'être un jeu pour lui.

Sa main se retire, brulée à vif par le baiser hérétique, il poursuit, ferme et abrupte. d'où te vient cette confiance ? Ou est-ce de l'arrogance pour avoir échappé au sort funeste de la mort pendant si longtemps ?