Comment t’as fait pour te retrouver dans une pareille situation ? Le dos accolé contre un mur humide de la pluie de la journée, en plein milieu de la nuit et entouré de trois types… Ouais, tu t’es mis dans une sale situation là, ça faisait bien longtemps cela dit et ça ne t’étais pas encore arrivé depuis que t’as posé tes bagages à Londres mais ça aurait été mieux de s’en passer complètement en fait…

Comment c’est arrivé ? Bah, t’as voulu voir un peu d’autres quartiers pour t’amuser un peu, voir ce que Londres a encore à t’offrir - et nul doute qu’il y a encore énormément de chose, après tout tu vas pas tout découvrir en l’espace de quelques semaines seulement - et t’es arrivé dans le quartier de Soho, là où se trouve également le territoire d’un des clans de vampire. Lequel ? Tu ne te souviens pas vraiment mais est-ce réellement utile de le savoir ? En soit oui, c’est toujours mieux de savoir où on met les pieds et sur qui on peut tomber… Enfin bref, revenons à nos moutons et à ta situation quelque peu précaire…

La nuit est déjà bien entamée, l’alcool bu dans le bar d’à côté a bien rempli tes veines, t’es pas totalement ivre mais pas totalement clean non plus. T’es dans un bon état, un état qui fait que t’es bien, qui te met dans ton petit monde, sauf que du coup t’es encore plus direct, t’as encore moins de filtre. C’est donc tout naturellement que tu t’étais mis à draguer un type dans le bar alors qu’il était casé, à moins que tu ne sois rentré dans quelqu’un ? Ou alors t’as joué au petit con, aucune idée… Tu te souviens plus trop ce qui t’a mis dans cette situation tout compte fait. Peut-être que t’as bien plus bu que tu ne l’aurais cru… Aïe, ça va pas t’aider ça. Dans tous les cas, t’as fait quelque chose qui a énervé le type qui te tient par le col de ta veste, plaqué contre le mur, à quelques pas du bar où tu étais une bonne vingtaine de minutes avant et d’un cabaret plus ou moins en face de là où tu te trouves actuellement.

Le mec qui te tient te crache au visage, pas dans le premier sens du terme, mais plutôt celui où mille injures sortent de sa bouche qui te cassent les oreilles. Tu te souviens clairement pas du pourquoi il est autant énervé, mais pour sûr, ton petit sourire en coin n’aide pas à le calmer. Tu hausses les épaules, parfois, balance une petite phrase comme ça, qui l’énerve encore plus, resserrant sa poigne sur ton col et ses deux potes de chaque côté de lui qui vocifèrent également à ton encontre. Qu’ils peuvent être chiants ! T’as juste envie qu’ils te lâchent mais visiblement, ce n’est pas prévu pour le moment. Tu lâches un soupir, un nouveau pic qui sort de ta bouche, un coup de poing qui vole jusqu’à ton visage et t’écrase violemment la joue. Ça fait mal ça. Tu craches au sol, lui jetant un regard noir de tes yeux ambré, l’une de tes mains venant se refermer sur le poignet qui te maintient. Tu serres, de plus en plus fort. Tu préviens le type de te lâcher, de ne plus te toucher au risque de lui faire ravaler ses coups, sauf que ça le fait rire, en même temps, t’es pas en position de négocier et voilà que tu te prends un nouveau coup, dans le ventre. Tu grognes, à la fois de douleur et de mécontentement. Un nouveau regard noir et tu profites du moment d’hilarité de ce type pour lui assener un coup de pied dans le tibia, ce qui eu pour effet de le faire relâcher la pression sur ton col, te permettant ainsi de te soustraire à sa prise pour cogner de nouveau. Évidemment, ses potes n’allaient pas se contenter de rester là à observer, ils interviennent rapidement, t’attrapant de chaque côté pour te bloquer pendant que l’autre reprend ses esprits pour te donner coup sur coup. Là ça commence à être vraiment la merde…

Ça aurait pu vraiment mal finir, vraiment, si cette personne n’était pas intervenu à temps… Coincé entre les trois hommes, le regard de l’un se bloque sur quelque chose, bientôt suivi de son autre acolyte qui cherche à te maintenir puis tous deux prirent la fuite sans que leur troisième pote, celui qui cherche à te rouer de coup depuis le début, n’en comprenne la raison, bien trop concentré sur son poings prêt à s’écraser sur ton visage avec une violence qui risquait bien de te péter un nez ou quelques dents.

Une main saisit le poignet juste attend, te faisant écarquiller les yeux de surprise. Si le mouvement des deux autres t’as intrigué, tu n’avais pas fait attention à l’approche de ce colosse qui vous surplombe sans la moindre difficulté. L’homme qui te tenait commence à pâlir en voyant celui qui le maintient désormais par le poignet et sa poigne se desserre jusqu’à venir te lâcher. Ton dos retombe complètement contre le mur, glissant de quelques centimètres contre, alors que ton “agresseur” tremble à moitié, s’excusant, suppliant le géant de le laisser mais l’attention de ce dernier est porté sur toi, te souriant et lorsque sa voix retentit de nouveau, tu entends cet accent que tu connais si bien et qu’il te semblait bien avoir entendu juste avant lorsqu’il est arrivé. Amusant.

Un sourire, quelque peu déformés par la potentielle ecchymose qui va commencer à apparaître sur ta joue, se dessine sur tes lèvres.

“ Ça pourrait aller mieux j’avoue.

L’autre cherche à se débattre pour faire lâcher prise au colosse visiblement bien plus fort que lui et que toi également d’ailleurs. Un grognement et tu te redresses un peu plus pour te retrouver droit, sans pour autant abandonner ton appui contre le mur.

“ Il semblerait que j’aurais fait quelque chose à ce type qui ne lui aurait pas plus, mais j’avoue avoir p’t’être un peu trop forcé sur l’alcool et pas me souvenir quoi.

Un accent russe toujours audible, même si moins prononcé que celui de ton sauveur, quoiqu’il ressort un peu plus que d’habitude sous l’effet de l’alcool. Si tu cherches à atténuer ton accent pour être au mieux compris des autres au cours de ton voyage, il semblerait que le géant se moque de cela et préfère garder ses origines, ce que tu comprends et il faut l’avouer, entendre quelqu'un possédant le même accent que toi a quelque chose de réconfortant, de familier aussi. Cela faisait longtemps et ça te fait penser que ça fait bien longtemps que tu n’as pas contacté tes parents pour entendre leurs voix.

“ Désolé pour l’merdier causé.

Tu cherches à quitter ton appui mais à peine ton dos quitte le mur qu’un nouveau grognement, mêlé à un faible couinement, s’arrache de ta gorge. Il t’a peut-être cogné un peu plus fort que ce que tu aurais cru, quel con ! Ta main droite se dirige au niveau de tes côtes gauche, ça pique mais t’es sûr d’une chose, t’as rien de cassé, tu vas juste avoir de belle couleur sur la peau d’ici quelques heures et une belle gueule de bois, quoique ça t’a bien fait décuver là. Tu te laisses retomber contre le mur afin de reprendre un peu plus ton souffle.

Le mec finit par partir la queue entre les jambes, rejoindre ses potes qui l’attendent probablement plus loin, en sécurité, à sûrement regarder d’un œil ce qu’il se passe et si leur pote est toujours en vie. La scène te fait sourire et le voir cavaler ainsi rire. C’était amusant de voir un pareil changement de comportement mais en même temps, il y avait de quoi se chier dessus, pour quelqu’un avec un temps soit peu de jugeote en tout cas, c’qui n’est pas toujours ton cas…

Maintenant que ces types ne sont plus là l’attention du géant se reporte de nouveau sur toi. Il est amusant de voir à quel point l’expression de son visage, mais également le timbre de sa voix, change lorsqu’il te parle ou lorsqu’il s’adressait à l’autre type désormais disparu de votre champ de vision. Tu fermes un bref instant les yeux en reprenant ton souffle puis plaque ta main de libre sur le mur pour prendre appuie dessus et mettre ta force et ton poids dans ton bras pour mieux te redresser. Tu réfléchis à sa proposition. Certains jugeraient ça de totalement inconscient d’accepter d’aller chez un parfait inconnu mais en même temps, t’es inconscient. Tu réfléchis pas toujours au bon moment, tout dépend de la situation, mais t’es pas non plus con au point d’aller te foutre dans une merde alors que t’es déjà mal en point. Pesant le pour et le contre, tout en prenant en compte les évènements qui se sont passés jusqu’à cette proposition, tu finis par donner ta réponse après un nouvel essai pour te maintenir debout.

“ J’habite pas à côté et j’suis pas sûr de réussir à marcher bien longtemps. Du coup j’dis pas non pour la première option. Promis j’reste juste le temps de moins douiller. Merci en tout cas, c’est grave sympa.

Faut savoir remercier quand il le faut et c’est pas tout le monde qui se serait amuser à s’interposer de la sorte, encore moins de te proposer de venir chez eux, même si ça peut rester une proposition étrange et dangereuse, mais quelque chose te dit que t’as rien à craindre pour le coup, ton instinct.

“ J’m’appel Ivan. J’étais venu voir et tester les bars de ce quartier. J’suis arrivé à Londres y’a quelques semaines.

Tu fais un pas, puis un autre, en prenant ton temps afin de te stabiliser un peu. Aller ça va le faire, t’as connu pire niveau baston, là c’était pas grand chose, mais ça fait quand même salement mal, heureusement que t’es du genre à guérir plus vite que la moyenne des humains. Merci les gènes. Tu lui fais signe que tu le suis.

“ Et toi, qu’est c’que tu faisais ici hormis voler au secours d’un pauvre gars ivre ?

Au moins il n’habite pas loin, ça sera bien plus simple pour toi de te traîner et te reposer un peu avant de pouvoir rentrer. Tu hoches simplement la tête pour lui répondre, commençant à le suivre d’un pas un peu plus lent qu’habituellement mais au moins ça te fait moins mal ainsi. Marcher est difficile mais pas impossible, seulement sur une longue distance ça c’est certain, puis discuter pendant le trajet te fera penser à autre chose.

“ Ah ah ouais, d’hab’ je me retrouve pas dans ce genre de situation, ‘fin, pas autant quoi.

T’es pas du genre à cacher les choses, il t’arrive de te retrouver dans ce genre de situation, plusieurs fois même, c’est limite quelque chose de normal que ça finisse en bagarre mais il est vrai que cela n’était pas encore arrivé depuis que t’as mis les pieds à Londres, enfin… Tu ne crois pas ? Bref, pas important, t’es indemne, ou presque, c’est l’essentiel, et avec de la chance tu ne croiseras plus ces gars, ou alors sous un jour où tu seras moins en galère et où tu pourras avoir le dessus, surtout face à cet idiot d’humain.

“ Avec ce style de job en plus, tu dois en voir passer aussi, quoique c’est p’t’être moins régulier que devant les clubs.

Pour avoir bosser comme surveillant à la sortie d’une boîte de nuit à deux reprises, t’en as vu des cas comme ça, que t’as dû régler bien souvent, seul ou à l’aide d’un collègue, mais dans un cabaret ça doit être assez tranquille, non ? T’es jamais entrée dans ce genre d’endroit mais ça sonne comme un endroit de luxe, un peu comme pas mal d’endroit dans ce quartier en fait.

Comme il l’avait dit, il vivait non loin de là et c’est rapidement que vous arrivez devant sa demeure, enfin la baptise, et c’est quelques étages après - tout en haut -  que vous arrivez à sa la porte. Entrant après lui et fermant la porte derrière toi, tu observes les lieux. Un appartement sobre mais grave stylé. T’aime beaucoup les lofts, tu trouves ça classe sans pour autant être coûteux, enfin tout dépend des lofts et de là où ils se trouvent. Une chose attire toutefois ton attention, ce sont les fenêtres condamnées. Il ne te faut pas bien longtemps pour comprendre la raison à cela… Un vampire. Tu te trouves chez un vampire, c’est bien la première fois. T’en a très peu côtoyé, voire jamais, et encore moins être allé chez eux, mais ça ne t’effraie pas plus que cela, du tout même.

Tu t’avances dans l’immense pièce en continuant de scruter les lieux. Te débarrassant de ta veste en cuir, plus lentement que ce que tu l’aurais voulu à cause de la légère douleur que te provoque certains mouvements. Tu déposes ta veste dans un coin et te laisse tomber dans le canapé avec un long soupir, après tout il t’a bien dit de faire comme chez toi.

“ Sacré appart’, j’adore.

Lâches-tu avant de sourire à sa proposition. Il ne sait pas cuisiner, est-ce quelque chose de normal chez les vampires ? Peut-être, en même temps ils n’ont pas besoin de savoir cuisiner, enfin… À moins qu’ils puissent manger certaines choses ? D’ailleurs, peuvent-ils se préparer des plats à base de sang ? Tu te met à imaginer des recettes basées uniquement sur cet ingrédient et ça te fait davantage sourire, amusé par ta propre connerie et ta non connaissance de cette espèce.

“ T’inquiète, j’ai surtout besoin de me poser un peu, mais merci pour la proposition.

Quelque chose arrive soudainement que tu n’avais pas repéré avant, trop préoccupé par ton exploration visuelle, un chat, un magnifique chat qui vient se caler sur les jambes de son propriétaire sans être nullement dérangé par ta présence. Le Russe attire ton attention et tes yeux quittent le félin pour le visage de l’homme.

“ Ouais c’est vraiment sympa, j’ai rencontré pas mal de gens cool aussi. Je viens d’un petit village de Russie. Et toi, t’es originaire de là-bas aussi si je ne me trompe pas, non ?

Le goût métallique dans ta bouche commence à t’écoeurer légèrement. Du sang, une petite blessure causée probablement par l’un des coups reçus mais jusqu’à maintenant tu n’y avais pas prêté plus attention que cela, sauf que ça devenait un peu désagréable. Tu t’excuses auprès de ton hôte pour te lever et te dirige vers l’espace cuisine, marchant déjà un peu mieux que lorsque tu es partie de l’endroit où tu as été “agressé”. Histoire de ne pas fouille, car t’as quand même un semblant d’éducation et de savoir vivre chez les autres, tu demandes au vampire supposé où se trouve ses verres avant d’en attraper un pour te servir de l’eau puis retourne t’installer sur le canapé pour te reposer un peu plus. Cela te faisait du bien d’être assis.

“ Désolé pour la question à la fois directe et indiscrète, mais t’es un vampire, non ?